Retrouvez un article de LePetitJournal.com venant de paraitre et qui me désigne comme le troisième homme de la campagne !
N'oubliez pas d'aller voter les 3 et 17 juins prochains.
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Candidat indépendant parmi les 20 candidats pour les élections législatives dans la 11è circonscription des Français à l’étranger (Russie, Asie, Océanie), Ludovic Chaker parcourt cette partie du globe depuis quatre mois, sur ses économies personnelles pour rencontrer les Français de l'étranger. Lepetitjournal.com l'a interviewé lors de son passage à Sydney. Il nous a livré son parcours, sa vision et ses propositions pour améliorer la vie de la communauté des Français de l'étranger
Photo Ludovic Chaker
Ludovic Chaker est pragmatique et indépendant. Aveyronnais de souche et issu d’une famille modeste, passionné d’arts martiaux, de littérature et de culture chinoise, Ludovic a un parcours atypique. Suite à un bac littéraire puis une licence de chinois, Ludovic choisit d’élargir son champ de connaissances en entrant au Celsa, dans l’option Magistère afin d’avoir une vision d’ensemble des métiers de la communication. Il obtient par la suite une maîtrise en sciences politiques à Nanterre pour terminer son cursus à Sciences Po Paris. C’est là, qu’il rencontre Richard Descoings, personne qui l’a beaucoup influencé dans la poursuite de cette campagne.
Ses premières expériences professionnelles, il les a connues en tant que consultant en stratégie et management pendant un an à Paris, puis chargé des relations universitaires au Consulat général de France pendant deux ans à Shanghai. De retour en France, il occupa les postes de directeur de cabinet du maire et directeur de la communication d’une commune de 50.000 habitants en Touraine. Sa dernière fonction, il l’a exercée en tant que directeur en charge du centre Asie-Pacifique-Afrique-Moyen-Orient de Sciences Po, fonction qu’il a abandonnée au 31 décembre 2011 pour se consacrer à temps plein à sa candidature aux élections législatives.
Lepetitjournal.com - Votre campagne, c'est 10.000 euros d'économie et beaucoup d'énergie ?
Ludovic Chaker - Tout à fait ! C'est une campagne de terrain d'abord que je mène sur mes deniers personnels en sillonnant depuis quatre mois la 11ème circonscription et en utilisant les réseaux sociaux. Lorsque la réforme constitutionnelle qui instaure l’élection des onze députés des Français de l’étranger a été mise en place en 2008, beaucoup de personnes de mon entourage personnel et réseau professionnel m’ont dit : "Pourquoi tu n’y vas pas ?". En effet, lorsque je suis parti à Shanghai en 2007, j’ai été moi-même confronté aux préoccupations des expatriés et ma vision d'eux a changé. Nous sommes loin des clichés sur les expatriés et j'ai découvert que si les Français à l’étranger sont d’une diversité étonnante, ils affrontent en revanche tous les mêmes défis, où qu’ils soient : souvent de la précarité, des difficultés à faire scolariser leurs enfants (et à faire reconnaître leur famille binationale par l’Etat, le manque de reconnaissance des diplômes ou encore une couverture sociale et de santé déficiente…autant de problématiques que je propose d'aborder.
Votre candidature est indépendante, pourquoi ?
Si je m’investis dans cette aventure c’est parce qu’au fond de moi, je sais que je suis le mieux à même de pouvoir représenter les Français de l’étranger à l’assemblée nationale. C’est un sentiment qui s’impose à moi depuis que je sillonne les pays allant à la rencontre de nos compatriotes français de la 11eme circonscription. Pour moi, les questions qui concernent les Français de l’étranger sont des questions apolitiques. J’ai fait le choix de ne pas être investi par un parti politique afin de garder ma liberté de parole.
Je serai un député itinérant tout en étant le porte parole des Français à l’étranger dans l’hémicycle
. Depuis que je n’occupe plus mes fonctions de responsable Asie-Pacifique pour Sciences Po, je réside au gré de mes pérégrinations et cela n’a pas lieu de changer. J’assumerai pleinement mes responsabilités au sein de l’Assemblée nationale tout en me déplaçant la moitié de mon temps sur la circonscription. Le travail de terrain est important pour connaitre les attentes de chacun, surtout des personnes isolées de la zone et de les comprendre tout en s’appuyant sur les réseaux locaux existants et les conseillers de l’AFE.
Réformer les institutions à budget constant pour plus d’efficacité
C'est un sujet concret. Le rôle du futur député sera essentiel car à ce jour la représentation des Français de l’étranger via l’Assemblée des Français de l’Etranger- AFE- n’est pas satisfaisante. D’ailleurs, connaissez-vous votre conseiller AFE ? Par ailleurs, il faut remettre à plat le fonctionnement de l’Assemblée des Français de l’Étranger (AFE). Instance louable, qu’il faut maintenir, elle n’est aujourd’hui guère plus qu’un collège électoral pour les sénateurs. Il faut lui redonner les moyens de fonctionner, afin que les élus de terrain soient vraiment les relais, les yeux de cette chaîne décisionnelle et de représentativité qu’il convient de mettre en place.Cette institution doit être re-fondée et devenir le fer de lance avec un collège d’experts, des élus de terrain qui travailleront en étroite collaboration avec les sénateurs et les députés. Dans cette perspective, il est indispensable que le secrétaire d’Etat des Français de l’étranger en soit le président, et à ce titre maintenu. Je crois pourtant savoir que François Hollande n’y est pas favorable, la participation des prochaines législatives sera par conséquent un signal fort envoyé par les Français à l’étranger afin de peser réellement dans nos institutions.
Réformer la sécurité sociale des Français de l'étranger
Ma deuxième thématique touche à la protection sociale, et en particulier l’assurance maladie. Il me semble nécessaire de réformer le fonctionnement de la Caisse des Français de l’Etranger – Aujourd’hui le fonctionnement de la CFE n’est pas satisfaisant. Moins de 8% des Français de la 11ème circonscription y sont affiliés. C’est une problématique à plusieurs niveaux. Sont exclus de la couverture de la CFE ceux qui en auraient le plus besoin. À mon sens, il faut que tout Français qui part au-delà de 3 mois à l’étranger puisse conserver un minimum au régime général sur l’affiliation de base à la sécurité sociale, afin de l’étendre pour tous les Français. Cette mesure est assez symbolique, car elle ne donne pas droit à des prestations gratuites, mais elle est la première pierre de l’édifice. De plus, sur la 11ème circonscription, seuls 3 pays sur 49 bénéficient de conventionnement avec des hôpitaux. C’est un travail typiquement apolitique, de terrain, qui doit être poursuivi. La plupart des Français se tournent actuellement vers des assurances privées, qui sont au même prix ou moins chères, ou bien vers pas de couverture du tout. Il faut revoir cette gouvernance dont la gestion financière est opaque et ses coûts trop élevés. Je souhaiterai étendre l’adhésion de base de l’assurance maladie en France à tous. Cela nécessitera une réforme phare, une mise à plat du système existant et des services qui soient adaptés à la situation personnelle des populations vivant à l’étranger.
Sur le même ordre d'idée, la problématique des retraites est également importante. Les Français se posent parfois la question de leur retour. Pour cela, je pense qu'il faut s'acheminer vers un système dual de retraite: conserver la retraite par répartition bien sur car je crois à la solidarité des générations mais il est important que l'état se penche enfin sur les systèmes par capitalisation qui existent dans de nombreux pays.
Que proposez vous pour améliorer la prise en charge scolaire ?
Evidemment je souhaite conserver la politique de bourse sur critères sociaux, mais ce que je souhaite mettre en oeuvre c'est une progressivité dans les frais de scolarité. Aujourd'hui, les familles ne représentent plus la même sociologie qu'il y a 15 ans. L'expatrié au sens statutaire du terme a tendance a diminuer au profit de statuts locaux. Il y a une vraie sédentarisation en particulier en Australie ou les familles sont de plus en plus mixtes, les revenus ne sont plus les mêmes et la typologie des problème a évolué. L'éducation est une préoccupation plus importante aujourd'hui et il est anormal qu'aujourd'hui soit vous êtes boursier et vous ne payez rien, soit vous payez 10,000 dollars par enfant. Il y un juste milieu à développer. Le critère de ressources doit être prise en compte et des paliers dans les frais de scolarité devraient être mise en place. Il faut aussi revenir sur la prise en charge mise en place par le gouvernement Sarkozy en 2007. Elle s’arrête aujourd’hui au lycée et ne constitue plus que 70% de la prise en charge des frais des lycées, en excluant les fonctionnaires et sans critères de ressources. Ce qui est une réelle aberration. A budget constant, je propose donc d’abroger ce système de prise en charge et de redistribuer les aides sous forme de bourse depuis la maternelle jusqu’au lycée, en incluant les fonctionnaires et en instaurant un système progressif sur critères de revenus familiaux.
Et pour cela, je propose notamment une reforme de l'AEFE (l'Agence pour l'Enseignement Français à l'Etranger). La gouvernance fonctionne mais elle est compliquée et illisible. Je compte la ramener dans le giron du ministère de l'éducation nationale pour lui redonner une vraie mission de service public. Nous sommes de plus en plus nombreux à vivre à l'étranger et l'accès à l'éducation française doit être un droit. Il faut aussi capter les enfants qui échappent à leur langue maternelle du fait d'une situation familiale binationale. Des initiatives ont déjà lieu dans les lycées français de l'étranger pour mettre en place le français comme langue de scolarisation et il faut développer cela pour éviter que les enfants issues de familles mixtes décrochent. Ils représentent aujourd'hui 50% des enfants français vivant à l'étranger, c'est important.
La défense des familles binationales est également un de vos chevaux de bataille ?
Il me semble essentiel de soutenir davantage les familles issues de couples mixtes. Partout où je vais, je rencontre des Français qui sont mariés avec des locaux. C’est devenu extrêmement courant et cela va le devenir encore plus à l’avenir. Cet état de fait, cette tendance lourde sont ignorés par les États et les institutions publiques. On a encore beaucoup trop de suspicion à l’égard des citoyens binationaux, en considérant que citoyenneté est égale à nationalité, ce qui n’est plus vrai. Il faut que les institutions considèrent enfin comme une chance le fait d’avoir des citoyens ouverts vers l’international. À ce titre je veux que les démarches administratives soient facilitées pour les binationaux, notamment concernant le retour au pays. Il faut aussi que les officiers d'état civil puissent prononcer des mariages mixtes à l’étranger. De plus en plus de français s’installent dans leur pays d’accueil notamment lorsqu’il y a mariage entre couples binationaux. Ces derniers ne représentent pas loin de la moitié des familles françaises à l’étranger. Il faut donc revoir leurs statuts. Par exemple, au Vietnam, un ami qui souhaite épouser une vietnamienne a dû passer des tests médicaux et psychologiques auprès des autorités locales, sans que notre consulat puisse rien faire, puisqu’en matière de mariages mixtes, nous sommes obligés de nous aligner sur les procédures locales puis seulement de reconnaitre ce mariage. Ainsi leur certificat à capacité de mariage se fait toujours attendre après huit mois de procédure, je propose donc que les officiers d’état civil français à l’étranger puissent célébrer ce type de mariage.
Le consulat doit être au service des Français à l’étranger et jouer son rôle en tant que tel. Une harmonisation, une communication commune ainsi qu’une coordination avec les autorités locales notamment en matière de plan de sécurité doivent être revus pour être plus efficaces. Par ailleurs je trouve anormal qu'il y ait des dizaines d'antennes consulaires dans certains pays d'Europe notamment et 3 seulement en Australie par exemple. La 11ème circonscription est un territoire où il y a de plus en plus de Français qui vivent, il serait normal qu'à budget constant, on attribue les mêmes services à ces populations qui augmentent.
Les Français qui vivent à l’étranger doivent faire entendre leur voix
Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus nombreux à partir à l’étranger : étudiants, stagiaires, jeunes actifs, entrepreneurs… Les chiffres ont doublé en moins de dix ans. Notre statut n’est toutefois pas assez reconnu. Il me parait important de rétablir des passerelles, des liens, entre la communauté expatriée, les institutions françaises, et l’opinion publique qui a une vision tronquée de la réalité. Nous sommes une chance pour la France, surtout aujourd’hui en terme économique, culturel, de visibilité et d’image. Depuis janvier, date de mon périple, je rencontre des personnes extraordinaires, curieuses et très ouvertes. Il y a de réelles "success stories", des jeunes qui réussissent malgré les difficultés et il me semble important de valoriser leurs parcours. Beaucoup aimeraient faire plus pour la France. C’est une vraie richesse et il est indispensable de rétablir le lien distendu entre les Français vivant à l’étranger et leur pays d’origine. Il faut tirer cette communauté vers le haut et arrêter les préjugés par méconnaissance.
Pour ce faire, il faudra se mobiliser davantage lors des élections législatives des 3 et 17 juin (grâce au vote électronique notamment !), car si la participation a été assez bonne à Sydney pour les présidentielles, l’abstention reste encore beaucoup trop importante, et je n’imagine pas la légitimité d’un député des Français à l’étranger élu avec seulement 20 ou 30% des inscrits. Si l'on veut que les Français de l’étranger fassent entendre leur voix, il faut qu’ils envoient des représentants légitimes à l’Assemblée nationale. J’encourage à rester mobilisé sur les élections législatives, à voter en masse, à utiliser le vote électronique, et je ne doute pas que les Français d'Australie montreront l’exemple. Pour ma part, cette campagne est une vraie bouffée d’oxygène, une belle aventure humaine et je remercie toutes celles et ceux qui m’hébergent lors de mon passage dans leurs villes/pays et qui me soutiennent au quotidien.
Propos recueillis par Flore Gregorini (www.lepetitjournal.com.sydney.html) vendredi 1er juin 2012